Briser la table de la salle de conférence et construire une hutte de sudation

Kathryn Eagles – Spécialiste technique de la protection de l’environnement

Kathryn et son père, Dave Eagles, explorant un affleurement rocheux dans les Territoires du Nord-Ouest en 2019.

Kathryn Eagles carbure aux défis. Lorsqu’elle a appris que la Régie allait devenir le premier organisme fédéral à adopter la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (la « Déclaration »), elle a donc voulu faire partie de l’aventure. En 2019, Kathryn a quitté un poste à Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada pour se joindre à la nouvelle Régie de l’énergie du Canada.

Dans son rôle actuel au sein du secteur des opérations sur le terrain, Kathryn se concentre sur les activités de vérification de la conformité et veille à ce que les sociétés respectent leurs obligations. Elle travaille principalement avec les inspecteurs et le sous-comité de surveillance autochtone, et agit pour eux comme défenseure et médiatrice.

« L’adoption de la Déclaration est un événement sans précédent qui comporte des défis colossaux et effrayants », affirme Kathryn. « Il n’y a pas de livret d’instructions et je considère que mon rôle consiste en partie à aider les gens à comprendre et à mettre en œuvre cet important projet. La Réconciliation se joue sur le terrain des opérations et c’est donc là où je dois concentrer mes énergies. »

Sa passion pour le travail avec les peuples autochtones lui vient de son père, Dave Eagles, un lieutenant-colonel à la retraite qui a dirigé le titanesque projet de nettoyage du réseau d’alerte avancé (« DEW ») du Canada (en anglais), qui a duré 18 ans et qui a coûté plus de 500 millions de dollars. Dave a collaboré étroitement avec les peuples inuits et inuvialuits et est l’un des pionniers de l’actuelle approche de nation à nation du Canada. Grâce à cette collaboration, la proportion d’Autochtones participant au projet a oscillé entre 65 % et 85 %, et celle des entrepreneurs contractuels inuits ou et inuvialuits, entre 60 % et 75 %.

« Dans la fonction publique canadienne, mon père fait figure de modèle dans le domaine des relations avec les Autochtones et de la Réconciliation et ce fut pour moi un défi et un honneur d’essayer d’en être digne ».

Inspirée par le travail de son père, Kathryn a pris le chemin vers le Nord immédiatement après ses études universitaires.

« J’ai passé la plus grande partie de mes huit premières années de travail dans des communautés du Grand Nord, où j’ai rencontré des gens qui se souvenaient clairement de la première fois où ils avaient rencontré une personne blanche », explique Kathryn. « Pendant que je regardais les gens vivre au quotidien, j’ai pu constater les effets des traumatismes passés, mais j’ai aussi vu des familles autochtones interagir, des artistes créer et des communautés s’épanouir. J’ai vu les diverses facettes de ces peuples. À la fin de mon séjour, j’avais compris que leur vie était beaucoup plus complexe que ce qu’on nous en montrait aux nouvelles. »

Lorsqu’on lui demande ce qu’elle aime le plus de son travail à la Régie, elle répond sans réserve que ce sont les gens avec qui elle travaille. « Ce sont des gens formidables qui proviennent de tous les horizons – sciences de l’environnement, génie, sécurité – et qui possèdent des expertises distinctes. Chacun apporte un point de vue unique. »

Kathryn préside également les réunions d’un comité consultatif et de surveillance autochtone avec des inspecteurs de la Régie. Ce groupe vise à offrir un espace sûr pour échanger, poser des questions et surmonter les différences.

« Nous ne pouvons pas nous soutenir les uns les autres dans le changement si nous ne pouvons pas parler ouvertement », affirme-t-elle. « Chaque semaine, je vois les inspecteurs apprendre les uns des autres et s’aider mutuellement pour mieux participer aux efforts de la Régie. Ça me redonne de l’énergie. »

Peu importe les progrès qui ont été réalisés, Kathryn sait qu’il reste encore beaucoup à faire. Elle croit que nous devons cesser de demander aux peuples autochtones ce dont ils ont besoin et leur donner un espace pour qu’ils puissent résoudre les problèmes à leur façon ou, comme elle le dit, « briser la table de la salle de conférence et construire une hutte de sudation ».

La récente couverture médiatique du drame des pensionnats indiens rappelle douloureusement que le racisme et l’inégalité demeurent un défi pour les peuples autochtones du Canada.

« Nous parlons des pensionnats indiens comme si c’était chose du passé. Encore aujourd’hui, il y a plus d’enfants autochtones en famille d’accueil qu’il n’y en avait dans les pensionnats. La destruction de la culture autochtone se poursuit. La douleur est toujours vive et ce n’est pas une cicatrice, mais une plaie ouverte. »

Les valeurs de Kathryn se manifestent clairement dans sa vie personnelle. Elle s’entraîne actuellement avec des collègues de la Régie pour la course TSUUT’INA (en anglais) qui se tiendra en octobre et qui vise à rapprocher les collectivités et à promouvoir un mode de vie sain par l’activité physique.

Kathryn et son père, Dave Eagles, explorant un affleurement rocheux dans les Territoires du Nord-Ouest en 2019.

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